La voix de la schizophrénie

Christopher, la voix de la schizophrénie

Schizophrène, Christopher souhaite donner une voix à sa maladie afin de faire tomber de trop nombreux préjugés.

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À 34 ans, Christopher possède un vécu rare. Des multiples épreuves qu’il a traversées, il a tiré force et philosophie qu’il souhaite aujourd’hui partager, tant par son investissement comme bénévole à la Maison de la Santé d’Évreux, que par ses vidéos de slam qu’il poste sur les réseaux sociaux. Schizophrène, Christopher souhaite donner une voix à sa maladie afin de faire tomber de trop nombreux préjugés.

 

Une dépression multipliée par dix… Tu peux croire à des signes, entendre des voix… 

Injustement associée au dédoublement de personnalité, ou à une forme de violence non contrôlée, la schizophrénie est un trouble psychique qui souffre de sa mauvaise perception auprès de la société. Des préjugés qui ont pour conséquences d’isoler les malades et leurs familles. « La schizophrénie, c’est une dépression multipliée par dix » explique Christopher. « Tu peux rester deux ou trois mois sans sortir de ta chambre. Tu te coupes de tout, tu restes allongé sur ton lit à angoisser. Ce sont des troubles cognitifs, tu peux croire à des signes, entendre des voix… »

Christopher n’est pas né schizophrène. Il a grandi à Crestot, un petit village eurois « de 300 habitants et 50 vaches », avec sa mère et ses cinq frères et sœurs. Malgré un contexte social compliqué, il vit une enfance normale et passe CAP et BEP « sans soucis ».

Les drogues comme déclencheur

À 16 ans, il est embauché comme menuisier au sein d’une entreprise du bâtiment. Mais en parallèle, il développe un goût prononcé pour la fête et ses excès et consomme surtout beaucoup de drogues. Un usage qui, comme chez de nombreux schizophrène, déclenche la maladie. C’est à 18 ans que Christopher connaît sa première crise. « Au début on ne se rend pas compte, on pense que les autres sont fous » se souvient-il. Sa famille contacte le médecin, il est alors emmené à l’hôpital de Navarre où il passe quatre semaines.

Diagnostiqué schizophrène, il suit un lourd traitement médicamenteux qu’il décrit comme « une neutralisation chimique » et le fait dormir « dix-huit heures par jour » pendant deux ans, une période de rémission qu’il passe chez lui, presque sans sortir.

Un QI supérieur à la moyenne

Christopher remonte alors la pente. Embauché en tant que cariste dans un magasin de bricolage ébroïcien, il y retrouve « une activité cérébrale » et s’épanouit au contact de ses collègues et des clients. Il fait alors partie des rares schizophrènes à occuper un emploi sans aménagement de poste, et est le seul, en France, à conduire un chariot élévateur, ce qu’il voit tant comme « une grande fierté » que comme la preuve que les schizophrènes ont leur place dans la société : « en plus d’avoir un QI supérieur à 130, les schizophrènes ont un esprit vadrouilleur, ils sont très créatifs. Par rapport au Canada, la France a 25 ans de retard sur la maladie. Là-bas, les schizophrènes sont beaucoup plus valorisés dans les entreprises qui se nourrissent de leurs idées. »

En 2016, après douze ans sans crise majeure, Christopher fait une rechute et reste interné quinze jours. Licencié, il se retrouve alors sans ressources et doit faire la manche cinq mois pour survivre. « Souvent, on nous isole du système, ce qui dégrade la situation. Mais il faut garder espoir, car il y a de la lumière au bout du tunnel » résume-t-il.

J’ai extériorisé mes angoisses

Christopher saisit alors la main tendue par la Maison de la Santé pour remettre le pied à l’étrier. Il s’implique bénévolement et apporte son soutien à d’autres schizophrènes, au travers du programme « pairémulation » où il partage son expérience avec d’autres malades : « la première étape de la guérison, c’est de reconnaître la maladie. Reconnaître qu’on a un handicap et que l’on suivra un traitement toute sa vie » ; ou leurs familles : « un schizophrène sur deux ne parle plus avec ses parents ou ses proches. Il faut être patient avec la personne, éviter les jugements et ne pas tenir compte de tous ses dires. »

En plus de ses médicaments qu’il voit comme sa « capsule de protection », Christopher a développé des activités créatives (lire ci-contre) pour l’aider à lutter contre l’anxiété : « par l’écriture, j’ai extériorisé mes angoisses. » Mais aujourd’hui, sa priorité est de venir en aide aux autres. Son but : devenir le porte-parole national de la schizophrénie.

« La schizophrénie, c’est ma force »

Revenant de loin, notamment de deux tentatives de suicide « la première cause de mortalité chez les schizophrènes », Christopher a développé optimisme et persévérance. Sa devise : « ce qui ne te tue pas te rend plus fort. La schizophrénie, c’est ma force » résume-t-il. « Sans ça, je serais mort dans les drogues. »

Grâce à son parcours et à l’aide qu’il souhaite apporter, Christopher est un porteur d’espoir et de sagesse. Tant pour les schizophrènes que pour le grand public.

Jérôme Lecoq

source : 2017 Actu.fr [/read]

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